GAM GAM © Natacha Samuel
« Dans l’argot de Ouagadougou, Gam gam désigne un “mélangeur, embrouilleur, vendeur de tout”. C’est ainsi que s’autodésignaient les garçons qui, à la fin des années 90, couraient les filles blanches en voyage pour s’ouvrir la porte de l’Europe. Ce milieu qui gravitait autour du grand marché de Ouaga n’est plus aussi flamboyant aujourd’hui, que les frontières de l’Europe sont toujours plus étroitement fermées. Mais l’horizon reste le même pour la jeunesse ouagalaise post-sankariste qui balance entre bataille quotidienne pour la survie et mise en oeuvre de stratégies désespérées pour se frayer une route vers l’Europe. Les gam gam se tiennent à la lisière entre l’Europe et l’Afrique, à ce point impossible du monde contemporain, point de fracture d’un monde bipolaire, cassé en deux. Le film interroge ce réel en s’attachant à des êtres dont il a modelé et modèle encore le destin. Karim est l’aiguillon, le conducteur du film. Karim le Blanc, l’aventurier en visite au pays, le gam gam triomphant aux gouffres amers. Dans son sillage on rencontre ses proches, on fait l’expérience de la difficulté des liens marqués par l’impensable de l’écart.
Karim, John Pablo, Moustache, Yacouba, je les ai rencontrés à Ouagadougou il y a une quinzaine d’années. Ils m’ont ouvert leur monde et le lien n’a cessé de se tisser depuis, au fil de nombreux voyages. Le film s’écrit dans des échanges, des face-à-face, souvent dans cet incroyable territoire commun qu’est la langue française, trace de l’histoire partagée. »
— Natacha Samuel
2015 / DCP 2K / 2h05
Production : Les films Serendipity & Shellac Sud