Après de nombreuses expériences théâtrales comme acteur et metteur en scène, Alexis Moati crée la compagnie Vol Plané avec la volonté de mettre l’acteur au centre des projets et d’affirmer la part d’auteur qu’il peut développer. Les créations revêtent donc à leur démarrage un aspect collectif, et s’ancrent dans un travail d’improvisation important. En plaçant les acteurs dans un dispositif (et non un décor), ils deviennent les constructeurs des univers successifs qu’ils traversent. Comme des enfants qui jouent, ils font évoluer l’espace autour d’eux au gré de leur imaginaire et restituent une vérité loin de toute psychologie. L’engagement physique du corps des interprètes est le point de départ pour travailler les personnages.
A partir de là, et depuis bientôt six ans, la compagnie Vol Plané et le metteur en scène Alexis Moati développent deux principaux axes de travail.
Le premier axe de travail s’est attaché à « ré-activer » des pièces du répertoire classique : en 2008 Le malade imaginaire de Molière, puis L’avare en 2011, sont une affirmation déterminante du rejet de toute illusion et d’une mise en jeu constante de la convention avec les spectateurs. Il revendique un théâtre volontairement pauvre qui donne à l’acteur une place prépondérante, tant dans le processus de création que dans ce qui est à voir au plateau ; la dynamique de jeu est physique, la langue occupe une place centrale, elle est action. Co-mis en scène par Alexis Moati et Pierre Laneyrie, ces deux spectacles ont remporté un succès non démenti à ce jour avec près de 500 représentations en France et à l’international dans les pays de langue francophone.
En parallèle, Alexis Moati met en oeuvre un travail d’écriture scénique singulier sur la thématique de la fin de l’enfance, à travers laquelle il pose la question de la transformation, de soi et du monde. Après Peter Pan ou l’enfant qui haïssait les mères, créé au Théâtre du Gymnase en 2010, et Petites Sirènes, créé à l’EDA en 2013, Et le diable vint dans mon coeur, créé à l’Espace des Arts en 2015, est le dernier volet de cette trilogie : l’impossibilité de grandir pour Peter Pan, la quête d’absolu pour Petites Sirènes, l’ouverture sur tous les possibles et la perte de l’innocence pour les adolescents. De 2012 à 2014, des ateliers de recherche et de création avec des adolescents de tous bords ont complètement été intégrés au processus de création. L’enjeu est d’intégrer le matériau de la vie pour faire théâtre.
En février 2016, Le misanthrope ou l’atrabilaire amoureux sera créé au Théâtre National de Marseille La Criée. Construit avec les mêmes contraintes dramaturgiques que les deux précédentes pièces de Molière, cette nouvelle création sera riche également du travail mené depuis 2010 sur ce que grandir veut dire. La Wendy de notre Peter Pan s’est prolongée dans l’histoire de Petites Sirènes, la quête d’idéal d’Alceste participe à l’inspiration de Et le diable vint dans mon cœur… Dans ces trois précédents spectacles, les adolescents se retrouvent à l’orée du monde : au-delà du jeu des apparences sociales et de la dénonciation de l’hypocrisie d’une société, Le misanthrope interroge un trouble plus profond qui pourrait se nommer « sens de la vie ».
Lorsque Vol Plané a décidé de répondre à l’appel à projet pour la Gare Franche, s’est imposée d’emblée la question du rapport au territoire. A l’évidence, ces quartiers sont d’une jeunesse incroyable. Une autre évidence, cette jeunesse est la promesse d’avenir de ces quartiers. En même temps qu’une source d’inquiétude. Or, c’est l’exploration de cet âge là, celui de la sortie de l’enfance, qui intéresse la compagnie. Il y a là un véritable enjeu artistique, éducatif et démocratique. LE GROUPE DES 15 ( classe libre pilote du Conservatoire de Marseille ) est un projet que la compagnie Vol Plané a inventé pour la Gare Franche dans les quartiers nord de Marseille. Les 25 jeunes gens qui composent ce groupe sont étroitement associés à la vie de la compagnie en résidence au long cours à la Gare Franche ; ils apprennent le théâtre selon une pédagogie active, font des sorties culturelles, voyagent, et vont à la rencontre du monde et d’eux-même.