© La Boite à Pandore
Hicham Abdel Gawad est professeur de religion islamique en Belgique. Il fait partie d’un réseau de chercheurs et d’enseignants qui utilisent les sciences humaines, l’histoire et l’anthropologie, pour aiguiser notre esprit critique vis à vis de la religion musulmane, de la production de ses textes, de son histoire… avec un discernement et une méthodologie dont notre époque a grandement besoin.
Son livre « Les questions que se posent les jeunes sur l’Islam » est à la fois un témoignage personnel (de la banlieue parisienne à la première librairie salafiste, puis l’étude de l’approche historique du fait religieux) et le témoignage d’un enseignant qui rend compte des chemins intellectuels qu’il prend pour aiguiser le sens de la recherche et de l’esprit critique à ses élèves vis à vis des théories fondamentalistes et absolutistes.
Il y témoigne des questions sans réponses qui laissent la part belle aux confusions parfois angoissantes, des réponses sans questions qui saturent cet « océan de discours » dans lequel de nombreux jeunes musulmans se perdent (internet), et surtout du besoin impérieux de rendre plus lisible à travers l’histoire des sociétés, l’histoire des croyances et des représentations, le fait que notre époque puisse réinventer les liens qu’elle tisse entre les sciences humaines, la recherche et les manières de croire.
Son livre est édité par La boite à Pandore en Belgique.
Voici quelques questions récurrentes qu’Hicham a abordé dans son livre :
« Monsieur, je ne comprends pas : Dieu dans le Coran, Il dit qu’un homme peut frapper sa femme ? »
« Monsieur, il y a un imam qui vient souvent à la maison, il est de la famille et il m’a dit qu’en vérité la Terre est fixe. C’est vrai ? »
« Monsieur, pourquoi Dieu n’a pas tout simplement descendu une clef USB contenant sa Parole ? »
« Monsieur, ça veut dire quoi : Dieu a préparé un paradis pour les Arabes. Et les autres alors ? »
…
Comment répondre ? Comment donner à réfléchir ? Hicham répond dans son livre, avec l’histoire, l’anthropologie, la linguistique, les sciences…
En se penchant sur le contexte socio-culturel de chaque époque, la méthode historico-critique offre des points d’appui : un temps, une époque, une société. Parler du Coran nécessite de revenir au 7ème siècle, durant cette période où, dans le désert d’Arabie, coulait une source d’eau intarissable à la Mecque, ville devenue lieu de croisement des clans et tribus juives, chrétiennes… qui vivaient là, faisaient commerce ou voyageaient dans ces régions. Quelles langues parlaient-ils ? Connaissaient-ils l’écriture ? Quels imaginaires de la vie et de la mort développaient-ils, à l’époque ? Quelles étaient les relations hommes-femmes à l’époque ? À qui parle Muhammad, à l’époque ? Quitter le bon chemin, « se tromper de voie » dans le désert et mourir sous les brûlures du soleil, cela devait être l’enfer… Comment le Coran s’est-il transmis ? À l’oral ? À l’écrit ? Quand et pourquoi sont apparus de nouveaux textes (la sunna, les hadiths…) ? Quelles traces archéologiques avons-nous des 7ème, 8ème, 9ème… siècles ?
Le livre d’Hicham est préfacé par Rachid Benzine, islamologue et chercheur au Fond Paul Ricœur, qui transmet depuis des années cette méthode historico-critique aux jeunes, familles, responsables…
Pour avoir une idée de l’approche historico-critique développée par Rachid Benzine, voici deux liens vidéo :
Au religieux, on répond par l’Histoire et l’anthropologie (2 mns) : ICI.
L’approche historico-critique (30 mns) : ICI.
Il était temps que l’on cède la place et que l’on donne la parole aux jeunes.
Dans tout ce qui se lit aujourd’hui dans les médias, dans les analyses des experts de tous bords, il était temps de remonter le courant et de s’arrêter auprès de cette jeunesse musulmane qui a des questions et qui veut des réponses. Parce que ces questions nous intéressent tous.
C’est un prof qui s’y colle, et pas n’importe lequel. Hicham est musulman et croyant. Il a été jeune (et ne l’a pas oublié), il est passé par toutes les phases de questionnement qu’il raconte avec beaucoup d’humour et d’humilité.
C’est un prof ouvert, attentif qui, dans ce livre, apporte des réponses à des questions précises.
Parce que, tout compte fait, on n’a pas trouvé mieux que de s’intéresser, d’éduquer, de porter les jeunes pour faire avancer une société. Il nous semble qu’il est plus que temps de passer aux travaux pratiques et concrets.
Un livre qui s’appuie sur les compétences à développer dans le cadre du nouveau cours d’EPC.
Un livre facile d’accès pour tous : jeunes, parents, professeurs, personnels associatifs et médiateurs inter-culturels.
Préface de Rachid Benzine
« Le travail de l’historien des religions est de contextualiser et de comprendre la religion comme phénomène historique et social ; il n’est pas de déterminer ce qu’il faut croire et ce qu’il ne faut pas croire, ce qu’il faut faire et ce qu’il ne faut pas faire. Pour l’historien des religions, une religion est ce que les gens en font, ni plus ni moins – et, on le sait, les gens peuvent faire d’une même religion des choses radicalement différentes : Torquemada et saint Vincent de Paul, par exemple, étaient tous deux de fervents catholiques. »
Guillaume Dye, Université Libre de Bruxelles – CIERL – Faculté de Philosophie et Lettres.
Hicham Abdel Gawad est né en 1983 à Saint-Cloud en France dans une famille égypto-marocaine. Il grandit dans les Yvelines (78) en banlieue parisienne. Après avoir fait des études d’électronique suivies d’une spécialisation en technico-commercial, il change complètement de cap et cède sa passion : l’étude des religions. C’est en partant pour la Belgique qu’il découvre l’approche du religieux par les sciences humaines, d’abord par le prisme des études historico-critiques à l’ULB avec Guillaume Dye et ensuite par les sciences des religions à l’UCL. C’est à la fin de son Master à l’UCL qu’il se lance dans la carrière de professeur de religion islamique dans le secondaire et qu’il prend conscience de l’importance des questions des jeunes dans la quête d’une théologie islamique digne du 21ème siècle.
En plus de l’approche scientifique des religions et de la Pédagogie du Croire chez les jeunes musulmans, Hicham est très attaché au dialogue islamo-chrétien dont son mémoire de fin d’études a d’ailleurs été l’objet. Son livre « Les questions que se posent les jeunes sur l’islam » est à la fois une lettre d’amour qu’il adresse à ses élèves et anciens élèves, en plus d’être un appel à une théologie islamique abreuvée aux sciences humaines. Son credo : « Un croire qui dépend du Savoir et non l’inverse ».